Gerce
Pour peu que l’on ait connu cette gerce, on sait qu’elle apprend à courir, dans tous les sens ou droit devant, à pieds fauchant ; son mantra possède et fait tourner le lait de Minerve : courir ou c’est la sidération qui l’emporte, menant à la tombe psychologique ou physique ; l’une tirant l’autre parfois jusqu’à leur dernier quai où consommer leurs fiançailles.
Comment fuir. Pourquoi fuir. Où ? Dans l’haleine perdue et la glace aux veines, dans l’abandon, ou dans un flot de paroles.
Paroles décousues, trop cousues, fausses, vraies, haineuses, essoufflées, trop douces, contrites, tristes, révoltées.
La peur bavarde toujours où elle se tait. La peur bégaye, la peur délaye, la peur concentre, elle décentre, recentre, excentre.
Elle pose nos nombrils sur la table et triche aux cartes célestes. Elle ne veut pas de ça chez nous.
Elle minore, exagère, délire, raisonne, elle sait plus fort que les autres et prend son verre à l’estaminet du doute.
Elle est inquisitrice, elle emmure et déterre.
La peur dénude et voile, elle montre ses chaînes par où elle se cache.
Elle pisse le sable et séquence le désert, elle soumet le ventre à la multitude en recomptant les tuiles de son toit.
La peur précise l’orthographe de la vie en touchant à tout et nos viscères.
Nous savons presque par où la peur nous mène mais, qu’est-ce qui fait enfoncer les dents de l’intérêt dans la chair éteinte ?
Marie Hurtrel